PORTRAIT : Guillaume Borga, photographe

l’instant et l’éternité

Du photographe, on attend souvent cette exquise gageure de saisir en un même mouvement l’instant et l’éternité. Un acte impossible que certains pourtant accomplissent miraculeusement, image après image. Tel Guillaume Borga, portraitiste des verticalités…

 

Propos recueillis par Vincent Raymond pour le magazine Bivouac Spirit, Mont-Blanc Immobilier.

 

L e talent est pareil à un diamant que l’on aurait la chance de découvrir fortuitement : il faut un travail acharné, méticuleux, pour lui permettre de dégager de la matière brute toutes ses facettes et révéler son incomparable éclat. Guillaume Borga ne réfutera sans doute pas cette image, lui qui en compose tant en domptant la lumière. Il sait combien celle-ci est fragile, voire parfois capricieuse, autant qu’il mesure la vertu du hasard et des occasions favorables. Panoramas sublimes et exploits sportifs grandioses sortent régulièrement de son boîtier, comme s’il avait la faculté de transmuter le quotidien en extraordinaire — «Je pense qu’il y a là une part d’instinct, tempère-t-il. Je trouve un paysage intéressant, j’ai envie de le partager, sans forcément engendrer quelque chose… et pourtant, ça provoque des émotions.»

Mais n’est-ce pas ce que l’on appelle “avoir l’œil” ? Et en photographie, l’œil se travaille comme un muscle… Encore le sport — déjà le sport devrait-on dire, puisque celui-ci est à l’origine de tout : « je le pratique depuis tout petit : randonnée, ski, vélo… se souvient l’enfant de Saint-Nicolas-de-Véroce. Quand on vit au cœur de cette nature, c’est une évidence ! On voit toutes les variétés des paysages. Et depuis une vingtaine d’années, le parapente m’a permis d’avoir encore un autre regard. » Très vite, Guillaume ramène des photos de ses escapades. S’il s’agit au départ d’images souvenirs « sans recherche poussée », l’amateur se pique peu à peu au jeu et, presque sans s’en rendre compte, se forme en autodidacte.

 

Nuit révélatrice

 

En quête de nouveautés et de défis, il part un soir sur les pistes afin de s’exercer de nuit, avec l’idée de capturer « autre chose que le ciel et la montagne ». Appelons cela une heureuse intuition puisque le spectacle des remontées mécaniques dévorées par l’obscurité (et cependant témoignant d’une présence humaine fantomatique) lui inspire une série mi-documentaire, mi-artistique : «J’avais trouvé que ces structures métalliques apportaient quelque chose à la photo», note-t-il sobrement. Il sait qu’il tient avec cette série en noir et blanc l’un des axes majeurs de son travail : des “natures mortes“ contemporaines, fixant l’immarcescible minéralité de la montagne, sans pour autant effacer la trace ni l’influence de l’Homme.

Des vanités modernes où l’on peut apercevoir ici des silhouettes, là une dameuse ; ailleurs des cairns… Loin d’être anodins, ces détails sont signifiants et racontent l’identité authentique d’un territoire que le Savoyard connaît bien : « On n’est pas dans les grands espaces américains dénués de la moindre trace humaine !

Chez nous, les paysages vierges et sauvages n’existent plus beaucoup. » S’il ne s’interdit pas toutefois d’en immortaliser certains encore intacts, Guillaume Borga s’ingénie à rendre l’artefact humain intéressant et esthétique.

 

Sans jamais se satisfaire : chaque image en appelle une autre : la suivante «C’est le côté challengeant de la photographie : chaque fois qu’on a une belle image, il faut faire non pas mieux, mais différent et tout aussi intéressant.»

 

©Guillaume Borga

 

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